20 septembre 2023
Chers collègues,
Aujourd’hui, j’ai le privilège de m’adresser à vous pour la toute première fois et pour l’occasion, je me demandais si vous aviez entendu parler de la fameuse nouvelle procédure du traitement des plaintes dans nos milieux scolaires ? Eh oui, nous n’avions pas assez de toutes nos responsabilités pour démarrer l’année scolaire dignement et faire rouler notre système éducatif que, déjà, on nous met sur la table cette nouvelle entité qu’est le Protecteur national de l’élève.
Mettons les choses en perspective. Anciennement, chaque centre de services se dotait de ses propres politiques en termes de gestion des plaintes. À l’égard d’une situation similaire vécue dans plusieurs régions du Québec, l’analyse du portrait, les conclusions et les recommandations qui en découlaient, pouvaient être très variables. De plus, chacun nommait son propre protecteur de l’élève et lui conférait les pouvoirs associés à son rôle pour le traitement des plaintes. Ces façons de faire ont anéanti la crédibilité du protecteur de l’élève et son impartialité ainsi remise en cause, le gouvernement s’est vu forcé de réviser et de recadrer la nature et les fondements même de cet organisme. Nous avons donc, maintenant, un Protecteur national de l’élève (PNE) ! Principalement, le gouvernement avait un besoin urgent d’uniformiser le processus de cheminement des plaintes, de le rendre plus uniforme et d’en raccourcir les étapes.
Certains d’entre vous ont peut-être déjà visionné la vidéo dans laquelle Me Jean-François Bernier explique son rôle bien important en tant que Protecteur. À première vue, cette vidéo fait quasiment peur ! Alors concentrons-nous sur les éléments clés de son discours. Premièrement, le PNE existe pour le volet information. La procédure mise sur pied lui permettra de prendre connaissance du nombre et de la nature des différentes plaintes qui peuvent être manifestées dans nos milieux de travail. Il aura la possibilité de les quantifier. Mais comment ? Eh bien, grâce à nous ! Puisque le projet de loi nous obligera à consigner par écrit chacune des manifestations de mésentente. Encore une couche administrative qui vient alourdir notre tâche. Deuxièmement, Me Bernier affirme que son mandat a pour but d’émettre des recommandations nationales. En centralisant la procédure de traitement des plaintes, il aspire à développer un regard national sur les problématiques vécues dans les établissements scolaires et à assurer une cohérence dans les directives qu’il soumettra en guise de résolution de situations complexes. Volonté d’un traitement équitable ? Eh bien, nous voilà donc tous rassurés, n’est-ce pas ?
Nous voulons protéger nos élèves
Sérieusement, chacun d’entre nous est engagé. Bien que le rôle du PNE ne soit pas de « trouver des coupables ou de sanctionner », nous sommes les acteurs des milieux éducatifs et nous sommes tous d’accord sur le fait que nous voulons protéger nos élèves, notre relève, et que nous allons au travail le matin avec le désir et la volonté de donner le meilleur de nous-mêmes. Sans vouloir être négative, je dirais que nous évoluons actuellement dans une société atteinte d’un mal affectif qui perdure et qui s’amplifie. On veut tout, tout de suite ! On veut la réussite, sans l’effort ! On veut la perfection, sans l’erreur ! Qui ne s’est pas déjà fait dénigrer dans l’exercice de ses fonctions parce que monsieur ou madame Tout-le-Monde s’était senti heurté ?
Les acteurs de l’éducation sont de plus en plus confrontés à une réalité taboue que je nomme « Parents gérants d’école » : ceux qui pensent que l’école est à la carte, ceux qui font toujours mieux que les autres et ceux qui ne se gênent pas pour mépriser impulsivement le personnel de soutien et les enseignants. Et pour faire le lien, c’est là le danger qui nous guette avec le PNE. Car dorénavant, le parent insatisfait ou l’élève brimé est invité à manifester son insatisfaction, quelle que soit sa forme, à qui de droit. Mais dans la situation inverse, rien de tel n’est prévu pour le personnel de l’éducation mal mené par les « Gérants ». Pourtant, ce ne sont pas uniquement les élèves et leurs parents qui peuvent avoir besoin d’être protégés de nos jours.
Bref, il va falloir être vigilants puisque dans le projet de loi, la définition du mot « plainte » a été rédigée en lui accordant un sens très large et l’effet pervers à cela résidera dans l’exagération. En effet, le projet de loi n’énumère aucun exemple concret de ce en quoi pourrait consister un désaccord ou une mésentente raisonnable. Mais le pire, au risque de me répéter, c’est qu’effectivement, il faudra documenter et résumer nous-mêmes, par écrit, chaque insatisfaction qu’on nous aura adressée ! C’est à mon sens ce qui est le plus absurde en ces temps où nous nous évertuons à identifier les facteurs de risque qui contribuent à alourdir notre tâche et qui mènent les gens à quitter le milieu de l’éducation.
Donc, comme chacun d’entre nous pourrait se retrouver dans la mire d’un plaignant, il faudra miser sur la communication, puisque c’est grâce à celle-ci qu’il nous sera possible d’établir de bonnes relations et d’éviter les conflits. De plus, le PNE devra clarifier les concepts flous de son projet pour éviter les débordements puis, il devra s’engager à abolir la lourdeur administrative que cela inflige au personnel de l’éducation parce que notre vase déborde déjà. Je vous invite visionner la vidéo du PNE plus bas. Vous pouvez également consultez le guide explicatif préparé par la Centrale.
Geneviève Bourbeau,
Coordonnatrice