Hein une pénurie? Ben voyons donc!

11 mars 2022

Vous vous souviendrez certainement du ministre Roberge, qui pendant longtemps, semblait ne pas vouloir admettre qu’il y avait une pénurie de personnel en éducation. En fait, du bout des lèvres, il précisait qu’il y avait des postes non comblés en début d’année, mais que le tout se résorberait rapidement dans les semaines suivantes.

Et puis, quand les médias, de même que les parents, ont pointé le faisceau vers les problématiques vécues dans certaines écoles voire classes, il a bien fallu qu’il fasse face à la musique. L’« opération main-d’œuvre en éducation » a été annoncée en grande pompe par les ministres Roberge et Boulet. Nous y reviendrons.

Est-ce strictement la faute du vieillissement de la population si nous sommes dans cette situation aujourd’hui ? Ce serait tourner les coins ronds que de regarder ce seul aspect. Une pénurie ne se produit pas du jour au lendemain. On ne se lève pas un matin pour se rendre compte que des postes sont non comblés et que les listes de rappel sont vides.

On ne peut faire fi des départs massifs en éducation dans le but de l’atteinte du déficit zéro à la fin des années 90, entre autres. On ne peut passer sous silence les diverses réformes et politiques découlant des états généraux de 1996. Enfin, on l’entend depuis plusieurs années, le monde change ! L’importance du travail a, certes, encore sa place, mais la conciliation travail-famille a pris du galon. Ce faisant, le monde de l’éducation aurait dû en prendre la mesure.

Au lieu de cela, les gouvernements successifs nous ont demandé de nous adapter avec moins. Les conditions de travail se sont détériorées au fil des changements de régime, avec toujours ce même mode de gestion qui privilégie moins d’interventions de l’État, en coupant allègrement dans les domaines de l’éducation et de la santé. Peut-on réellement compresser les dépenses quand on parle de l’éducation de la population et de sa santé ?

Quand les conditions de travail deviennent pénibles, que le travail se complexifie, que la gestion de personnel penche vers une vision technocrate de celle-ci, inévitablement les métiers de l’éducation deviennent beaucoup moins alléchants. On repassera donc quand il s’agit de parler d’attractivité et de rétention.

Ce serait se cacher la tête dans le sable que de ne pas rappeler l’importante présence féminine dans le secteur de l’éducation. Seulement, ce serait agir de la même manière, en ne prenant pas en compte qu’aujourd’hui, les femmes se retrouvent devant des choix professionnels beaucoup plus larges et accessibles qu’auparavant. L’idée de vocation en prend pour son rhume.

Ainsi, plusieurs facteurs ont participé à la problématique face à laquelle nous nous retrouvons actuellement. Alors, quand le gouvernement du Québec réitère son appel aux retraités, qu’il veut recruter à l’étranger ou encore qu’il demande au personnel de son ministère de prêter main-forte en faisant de la suppléance sur une base volontaire, on ne risque pas de voir disparaître la pénurie…

Des renforts à court terme, oui, nous pouvons saluer l’effort. Mais à quand une réelle réflexion sur l’amélioration des conditions de travail, sur l’attractivité vers les professions en éducation, sur la rétention du personnel en place et celui à venir ? À quand une vision qualitative de l’éducation ? À quand une réelle écoute des solutions du personnel enseignant et du personnel de soutien ?

Mireille Proulx

Coordonnatrice