12 mars 2019
Cap-Chat, Cap-à-l’Aigle, Cap-aux- Meules, Cap-Rouge, Cap-des-Rosiers, tous des beaux coins de pays que plusieurs d’entre vous ont peut-être visités avec plaisir. Malheureusement, tous les CAP ne se ressemblent pas ! Depuis un certain temps, j’entends des enseignantes et des enseignants dire qu’ils se présentent aux rencontres de CAP plutôt à reculons.
Les pèlerinages au Cap-de-la-Madeleine ou l’espoir d’être plus en forme en passant par Cap-Santé ne semblent pas être exaucés ! Effectivement, cette proposition de communauté d’apprentissage professionnelle (CAP), qui, initialement, laissait entrevoir un voyage agréable, se déroule plutôt sous un ciel pluvieux. Les conditions routières ont changé et plusieurs collègues qui avaient accepté d’embarquer afin d’échanger sur leur pédagogie, leurs exercices, leurs pratiques et autres sujets pouvant nourrir une réflexion plus poussée, mettent aujourd’hui la pédale douce.
Le chemin a bifurqué pour certaines écoles et les échanges sont devenus des formations. Une enseignante me disait : « Je remets la démarche en question. Il y avait des points en faveur des CAP : avoir du temps pour se parler, échanger, approfondir certaines choses, bâtir du matériel, monter des évaluations. Mais pour l’instant, ce n’est pas la réalité. On se fait imposer un jargon technique, des notions théoriques qui ne nous aident pas nécessairement au quotidien… Nous nous sommes fait prendre, cette année, à devoir soumettre individuellement les élèves à des tests diagnostiques. C’était compliqué, ç’a pris un temps fou, autant les comprendre que les faire passer. Tout cela pour ne pas nous servir à grand-chose au final. […] Notre orthopédagogue, qui est là quelques jours par semaine, nous a remplacées dans nos classes quand nous avons fait passer les tests. Donc, durant trois semaines, elle a suspendu son horaire habituel pour être dans les classes. Sérieux, le document faisait une vingtaine de pages avec du jargon d’une autre profession que celle pour laquelle j’ai étudié. Nous nous sommes toutes senties un peu nulles, car on ne comprenait pas trop… »
C’est moi ou les rôles sont inversés ? Une chose est certaine : c’est de l’ouvrage additionnel qui s’ajoute à la surcharge et à l’épuisement. Dites moi, pour qui fait-on cela exactement ? Le contexte de la gestion axée sur les résultats contribue, une fois de plus, à changer une bonne idée en formation obligée, en contenu obligatoire et à déformer l’intention louable première. On nous a encapsulés.
De plus, dans certains milieux, la direction assiste aux rencontres et prend des notes… Dans quel but, exactement ? Surveiller ? S’assurer que nous ne parlons que d’éducation ? Veut-on s’en servir pour pointer une personne qui a exprimé une difficulté ?
Les enseignants sont formés pour analyser les besoins des élèves, pas pour les diagnostiquer. Pourquoi ne recevons-nous pas des outils prêts à utiliser, du matériel « clé en main » ? Nos analyses et celles des professionnels ne devraient-elles pas servir à mettre en place des services supplémentaires pour l’élève ?
Il y a quelques années, quand nous avions du temps, à une époque où l’on reconnaissait notre jugement, notre professionnalisme et notre expertise, nous partagions entre collègues avec bonheur et nous « trippions » à le faire. Malheureusement, être encapsulé tue la collaboration et désillusionne quant aux possibilités que laissaient entrevoir les CAP.
Mireille Proulx
Coordonnatrice