13 mai 2018
Le 1ermai dernier, les chauffeurs d’autobus syndiqués à la CSN annonçaient leur intention de déclencher une grève d’une journée le 15 mai prochain.
Quelque 2170 conductrices et conducteurs, 44 syndicats, 32 commissions scolaires impliquées, 110 000 élèves touchés : que ce soit de près ou de loin, plusieurs d’entre vous serez concernés par ce mouvement. Pour mieux comprendre ce qu’il en est, Le Champlain s’est entretenu avec Stephen P. Gauley, le président du Secteur du transport scolaire (STS) de la Fédération des employées et employés de services publics (FEESP-CSN).
Le nerf du conflit, c’est l’amélioration des conditions de travail. Saviez-vous que les conducteurs d’autobus scolaires gagnent en moyenne 19 288 $ par année ? C’est environ 8,5 % de moins que pour des emplois comparables dans le secteur privé du transport. Et l’écart ne cesse de se creuser au fil des ans.
Stephen P. Gauley précise que dans certaines régions, le taux horaire est à peine plus élevé que le salaire moyen. Quatre-vingt-dix pour cent d’entre eux n’ont aucuns avantages sociaux : pas d’assurances collectives, pas de régime de retraite. Et, contrairement à la rumeur qui veut que ce soient surtout des retraités qui conduisent les enfants à l’école pour « se tenir occupés », M.Gauley indique que seulement 13 % des conducteurs sont des retraités.
« La grève du 15 mai prochain pourrait être suivi d’un débrayage si rien ne se règle d’ici là, puisque les membres ont voté en faveur d’un mandat de grève de six journées. »
Même si plusieurs négociations se poursuivent entre les différents syndicats locaux et les transporteurs, le STS a choisi de mener de front la lutte pour l’obtention de meilleures conditions, d’où le tour de force du débrayage du 15 mai prochain, signe de toute la détermination et de la solidarité des chauffeurs dans ce dossier, insiste Stephen P. Gauley.
« Ça fait beaucoup trop longtemps que ça traîne. D’une année à l’autre, d’une négociation à l’autre, rien ne se règle vraiment. Cette fois, avec les syndicats regroupés, nous nous attaquons au cœur du problème, le financement du service de transport scolaire. Nous avons une bonne écoute du ministre [de l’Éducation], mais aucun retour. Et à la veille des élections, c’est le temps de bouger. Si on avait eu des rencontres pour faire avancer le dossier, on n’en serait pas là. »
Une roue qui tourne
Les commissions scolaires reçoivent, du gouvernement, du financement pour le transport scolaire. Puis, elles vont en appel d’offres auprès des transporteurs privés pour donner ce service. En bout de ligne, la marge de négociation financière est mince et ce sont les employés qui écopent.
Or, même si le gouvernement finance initialement le transport scolaire, il ne veut pas être reconnu comme le véritable employeur. Imaginez négocier dans ces conditions, alors que tout le monde se renvoie la balle. « C’est une roue qui tourne. Là, c’est assez ! »
Les syndicats regroupés au sein du STS réclament donc une enveloppe budgétaire supplémentaire, fermée, qui serait exclusivement dédiée à l’amélioration des conditions de travail des employés. Cette solution proposée par le STS est inspirée de ce qui s’est fait, il y a quelques années, en Ontario alors également aux prises avec une pénurie de main-d’œuvre.
Le STS réclame plus de 26 millions de dollars, soit une somme qui représente-rait environ 2 675 $ par année pour chacun des 10 000 conducteurs à travers le Québec. Cette solution permettrait de réajuster les salaires et ainsi pallier à la pénurie de main-d’œuvre.
« Dans certaines régions, il y a des retards dans des circuits, d’autres ne sont carrément pas faits. On a vraiment atteint une limite. Les commissions scolaires font toujours plus de demandes, avoir des GPS, des caméras et d’autres exigences, mais le financement ne vient pas avec ces demandes. Les répercussions sur nos membres sont grandes. Imaginez, les commissions scolaires voulaient donner des pénalités et des amendes pour les circuits qui ne sont pas faits ! Qui va payer pour ça vous pensez ? Il faut que tous les intervenants arrêtent de se mettre la tête dans le sable ! »
Sans compter que si l’augmentation de la violence (verbale et physique) chez les élèves et les troubles de comportement se font sentir pour le personnel enseignant et de soutien scolaire, ces problèmes ne s’envolent pas une fois la porte de l’autobus refermée !
« Ce qui est incroyable, et c’est vrai à la grandeur de la province, c’est le peu de respect dont les commissions scolaires font preuve à l’égard des conducteurs d’autobus scolaire ! » À suivre donc !