18 mai 2017
Dossier spécial: Projet de loi no 105
Nous continuons notre série d’articles sur les modifications apportées à la Loi sur l’instruction publique (LIP) par le projet de loi no 105 en étudiant les changements au processus de planification et de reddition de comptes.
Rappelons tout d’abord qu’avec la Nouvelle gestion publique, le gouvernement a implanté une vision comptable de l’éducation, en imposant l’atteinte de cibles chiffrées pour mesurer le taux de diplomation. Les organisations syndicales ont toujours décrié cette vision étroite de l’éducation, en insistant sur le fait que la réussite éducative des élèves va bien au-delà de statistiques à court terme. Globalement, le PL no 105 n’apporte pas de solutions concrètes à la réussite éducative, mais plutôt un remaniement des outils de gestion dans le but d’en simplifier la reddition de comptes.
D’entrée de jeu, il est important de souligner que le ministre Proulx n’insiste plus sur l’atteinte de cibles chiffrées mais bien de cibles visées. De plus, la notion de taux de diplomation est maintenant remplacée par le taux de réussite.
Un plan d’engagement vers la réussite
Pour les commissions scolaires, la convention de partenariat et le plan stratégique sont maintenant rem- placés par un plan d’engagement vers la réussite. Ce dernier devra contenir le contexte dans lequel la commission scolaire évolue, les orientations et les objectifs retenus, les cibles visées ainsi que les indicateurs pour en déterminer l’atteinte. Le plan d’engagement doit être cohérent avec le plan stratégique du ministre de l’Éducation. Or, le projet de loi est muet quant au moment où le ministre doit le déposer. Soulignons ici que le dernier plan stratégique date de 2013, et que six ministres ont occupé ce poste depuis !
Plusieurs commissions scolaires ont déjà entamé le processus de consultation afin de dresser le portrait de leur milieu. Dans certains cas, une consultation publique est entreprise sous forme de rencontres d’échanges, permettant ainsi aux personnes impliquées d’intervenir sur les éléments qu’ils considèrent comme pertinents afin de favoriser la réussite éducative.
Par contre, ce processus prend du temps et demande aux différents acteurs du milieu scolaire de se concerter. Il faut bien plus qu’une analyse de sondage afin d’établir un portrait du contexte de même que les caractéristiques et objectifs de son milieu.
Il va sans dire que nous défendons une vision de l’éducation en phase avec les besoins des élèves et des adultes en formation, et que cette vision devrait également être respectueuse des besoins du personnel scolaire. Le plan d’engagement de la commission scolaire doit prendre effet le 1er juillet 2018.
Un projet éducatif pour les écoles et les centres
Dans les établissements, le processus de reddition de comptes a également été simplifié. À partir de juillet 2019, le plan de réussite et la convention de gestion tombent et n’est conservé que le projet éducatif de l’école, qui devra être révisé.
Dans les centres, par contre, les orientations sont remplacées par le projet éducatif, qui devra quant à lui, être rédigé.
C’est le conseil d’établissement qui est responsable de la réalisation et de l’évaluation du projet éducatif. Ce dernier devra contenir le contexte dans lequel l’école évolue, les principaux en- jeux sur le plan de la réussite ainsi que les cibles à atteindre. Il faut garder en tête que l’école n’est pas l’unique responsable de la réussite et que son contrôle sur certains facteurs est restreint. C’est le cas pour l’organisation des services, qui est tributaire d’un ensemble de facteurs qui échappent souvent à l’établissement.
Des moyens de mise en œuvre
Les enseignants et les membres du personnel de soutien et professionnel devront se concerter afin d’élaborer une proposition de moyens pour atteindre les objectifs et les cibles visées dans le projet éducatif. La proposition devra être basée sur ce projet éducatif. Les membres du personnel seront donc appelés à travailler sur cette proposition à partir de septembre 2019. Il faudra être vigilants pour ne pas s’imposer des cibles sur lesquelles nous n’avons aucun contrôle. Il ne faut pas mettre l’accent sur les résultats quand les moyens et les ressources ne sont pas à la hauteur des besoins.
Le projet de loi no105 vient donc consolider la gestion par statistiques du gouvernement, sans toutefois influer grandement sur la réussite éducative. Il est essentiel que les commissions scolaires et les directions d’établissement s’appuient sur l’expertise du personnel de l’éducation pour l’élaboration du plan d’engagement et du projet éducatif, car c’est lui qui accompagne chaque jour les élèves et les adultes en formation.
Un financement adéquat devra être au rendez-vous afin que le personnel puisse travailler dans les meilleures conditions possibles et qu’il ne porte pas seul la responsabilité de la réussite.
« Nous devons accepter le changement mais conserver nos principes. » – Jimmy Carter, 39e président des États-Unis.