3 mai 2017
Des changements en matière de gouvernance scolaire
En novembre 2016, le gouvernement du Québec sanctionnait le projet de loi no105, apportant ainsi des changements importants à la Loi sur l’instruction publique, surtout en matière de gouvernance scolaire. Dans une série de trois articles, nous étudierons ces changements ainsi que leurs répercussions sur notre travail au quotidien.
Un peu d’histoire s’impose
En 2000, le gouvernement du Québec adoptait la Loi sur l’administration publique (A-6.01), qui introduisait la gestion axée sur l’atteinte de résultats (GAR). Deux ans plus tard, le projet de loi no124 rendait la Loi sur l’instruction publique (LIP) conforme à la Loi sur l’administration publique en implantant un processus de reddition de comptes. En 2008, le projet de loi no88 formalisait davantage la GAR en éducation via l’imposition des cibles mesurables chiffrées dans le processus de reddition de comptes. À l’époque, les syndicats s’étaient mobilisés pour dénoncer la vision comptable de l’éducation qu’implantait ce projet de loi.
Puis, en 2015, la question des fusions de commissions scolaires refait surface avec le projet de loi no86, lequel a finalement été abandonné. Le gouvernement a donc fait marche arrière, mais il est revenu avec l’adoption rapide du projet de loio105, dans lequel il impose plusieurs changements dans l’organisation et la gouvernance des commissions scolaires.
Concentrer les pouvoirs et décentraliser les budgets
Premièrement, le projet de loi concentre davantage de pouvoirs entre les mains du ministre de l’Éducation. Ce dernier peut outrepasser les structures démocratiques intermédiaires que sont les commissions scolaires et transférer de nouvelles responsabilités directement aux établissements.
Prenons par exemple la décentralisation de certaines mesures budgétaires. Le ministre n’a pas attendu l’adoption du projet de loi avant de transférer des sommes dans les établissements, en l’occurrence la mesure 30170. Rappelons que dans le contexte d’austérité des dernières années, le milieu scolaire a subi des coupures de près de 1 milliard de dollars. Les nombreuses suppressions de postes ont eu pour effet de diminuer les services offerts aux élèves et de générer une surcharge de travail sur l’ensemble du personnel scolaire.
Ces sommes découlant de la mesure 30170, décentralisées directement dans les établissements, devraient donc logiquement servir à l’embauche de personnel scolaire.
Une mise en garde s’impose ici quant à la prolifération de projets de tout acabit venant du secteur privé. Il faut rester vigilant et s’assurer que les établissements ne soient pas tentés d’utiliser ces sommes pour recourir à des partenaires externes au détriment du personnel qualifié dans nos établissements.
Ces organismes n’ont pas les mêmes rôles, missions, mandats et responsabilités que le personnel scolaire et le recours à leurs services devrait se faire dans une perspective de complémentarité et non de remplacement des services.
Deuxièmement, le ministre de l’Éducation introduit le principe de subsidiarité dans la gouvernance scolaire, mais en y modifiant la définition. En effet, utilisé dans sa version originale, le principe de subsidiarité obligeait les commissions scolaires à une décentralisation importante de l’organisation des services et des budgets vers les établissements. Mais, suite au travail fait en commission parlementaire, la définition incluse dans le projet de loi a été modifiée pour permettre à une commission scolaire de déterminer où se situe le « niveau approprié d’autorité ». Celles qui désirent maintenir une organisation centralisée pourront donc le faire dans une certaine mesure.
Même si nous croyons que les établissements sont les premiers à connaître les besoins de leur milieu, il est important de conserver une vue d’ensemble sur les services offerts afin de s’assurer de l’égalité des chances de tous les élèves et adultes en formation. Nous reviendrons plus en détails sur cet aspect dans un texte ultérieur.
Bien que nous saluons l’engagement du ministre à réinvestir en éducation, nous restons prudents quant au pouvoir de décentralisation qu’il s’octroie dans le nouveau projet de loi. Il faut reconnaître l’importance de maintenir une organisation centralisée des services afin d’avoir une vision d’ensemble des ressources et des besoins. Une trop grande décentralisation pourrait avoir des effets sur la continuité des services offerts ainsi que sur la stabilité du personnel en poste.
Comme le disait Winston Churchill : « Il n’y a rien de négatif dans le changement, si c’est dans la bonne direction. »
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